1 pétrissage manuel, 4 types de pains et 2 TH
Le choix du pétrissage manuel
J’ai fait le choix de pétrir à la main, d’abord parce qu’à mes débuts je n’étais pas équipé, mais ensuite pour les vertus de cette pratique manuelle :
- Indépendance vis-à-vis d’un équipement sinon coûteux (le pétrin), ce qui me donne de la résilience tout en diminuant les coûts. Certes, je peux facilement me le permettre du fait que je ne produis pas du pain en grosse quantité chaque jour, mais seulement une fois par semaine.
- Qualité digestive du pain produit : moins de gluten et donc plus facile à digérer, moins d’oxydation (car moins de pétrissage et d’injection mécanique d’oxygène dans la pâte) et donc moins de pertes en vitamines
Ce choix d’une pratique manuelle, qui peut cependant être compatible avec des productions jusqu’à 80 kg par jour, comme le fait Nicolas Supiot par exemple, a un petit inconvénient : cela peut prendre plus de temps, et cela peut être un peu physique (mais rien d’exceptionnel). Par ailleurs, l’obtention d’une belle pâte bien lisse n’est pas toujours simple à obtenir pour celui qui se lance dans ce type de pétrissage.
Au passage, je ne peux que vous conseiller la très instructive vidéo sur le pétrissage manuel proposée par l’Ecole Internationale de Boulangerie (EIB) : https://www.youtube.com/watch?v=FkvjdqkZWqg
Faire différents types de pain avec deux TH en un seul pétrissage
Il m’arrive régulièrement de devoir faire plusieurs types de pains dans la même session, pour refaire les stocks, ou à l’occasion d’un repas, etc. Par exemple, un cas courant :
- Du pain nature
- Du pain aux Noix
- Du pain aux Graines
- Du pain aux fruits (raisins ou figues-abricots)
Faire 4 pétrissages imposerait de peser 4 fois les ingrédients, et de pétrir 4 fois. C’est long et inutile.
J’ai donc développé une technique qui me permet de tout faire en une passe, tout en gérant deux TH différents, et en obtenant facilement une pâte très lisse et agréable à travailler.
Pourquoi gérer deux TH ? : je me suis aperçu par l’expérience que si mes pains aux graines et aux fruits acceptent un certain TH (1) (2), mon pain nature accepte un TH inférieur (3).
En pratique, je procède donc de la manière suivante :
1- J’ai préparé la veille mes quantités de graines et de fruits, que j’ai hydratées à 35% (donc 35g d’eau pour 100g de complément), dans des récipients ayant une taille conforme à la quantité que je souhaite produire
2- Je prends une grande bassine en plastique alimentaire dans laquelle je place la quantité de levain dont j’ai besoin
3- Je pèse dans un autre récipient la quantité totale de farine dont j’ai besoin pour mes 4 types de pains, ainsi que le sel de Guérande (que je dose à 13g par kg).
4- Je pèse ensuite l’eau dont j’ai besoin pour les 4 types de pains, et je la mets à température (ma Température de base étant fixée à 73°).
5- Je verse l’eau à la bonne température dans la bassine, et je la mélange manuellement avec le levain qui s’y trouve : cela me garantit que le levain est uniformément présent dans l’eau.
6- Je verse alors 50% de la farine dans l’eau (sans le sel), et je mélange l’ensemble manuellement, ce qui me donne une pâte fluide assez grumeleuse.
7- Je laisse reposer ce premier mélange pendant 5 minutes : cela donne à la farine le temps de s’imprégner d’eau, ce qui se traduit par une pâte déjà plus lisse, sans effort.
8- J’ajoute alors l’autre moitié restante de farine et le sel qui s’y trouve. Et je mélange pour que l’ensemble soit simplement homogène. ATTENTION, il ne s’agit pas ici de pétrir, car j’ai besoin d’une pâte encore peu structurée pour y ajouter les fruits et les graines !
9- Je verse alors la quantité nécessaire de pâte dans les récipients qui contiennent les Noix, les Graines, les fruits (soit 1050 g de pâte, en plus des graines et fruits, pour obtenir un kg de pain cuit)
10- Comme il ne me reste plus que la pâte destinée à faire du pain nature dans ma bassine, je lui ajoute la quantité de farine nécessaire pour que son TH passe de 69 à 66%, et je commence à la pétrir réellement.
Une fois que j’estime que la pâte commence à prendre forme, je la mets de côté, et je m’occupe du pain aux Noix (moins « salissant » que les autres).
11- Je travaille dans le récipient du pain au Noix, avec d’abord pour objectif d’incorporer les noix dans la pâte à pain. Je replis donc la pâte sur elle-même en intégrant les noix, jusqu’à l’obtention d’une pâte homogène. Et je passe au Pain aux Graines
12- Comme pour le pain aux Noix, j’intègre ici les graines dans la pâte, jusqu’à obtention d’une pâte homogène, avant de passer au pain aux raisins
13- J’intègre les raisins à la pâte, puis je retourne à mon pain nature
14- Je recommence à pétrir mon pain nature, jusqu’à ce que la pâte soit ferme et rebondie, avant de repasser au pain aux noix, etc…
Je travaille donc la pâte 3 fois avec la séquence suivante :
Nature > Noix > Graines > Fruits
>> Nature > Noix > Graines > Fruits
>> Nature > Noix > Graines > Fruits
Puis je laisse la pâte pointer 16 heures à TA (21°C environ).
Des avantages
Les avantages de cette approche sont les suivants :
- Un travail de frasage et de pétrissage facilité par les divers temps de pause donnés à la pâte
- Une belle pâte lisse obtenue sans aucun effort et avec relativement peu de travail de la pâte
- Un seul pétrissage pour plusieurs types de pains différents, avec deux TH.
(1) 69% en l’occurrence (hors prise en compte de l’hydratation ajoutée aux graines et aux fruits soit 5% de plus) sachant que je travaille en faible ensemencement (1% de levain seulement, soit 10 (dix !) grammes de levain par Kg de farine) et que cela correspond à 10% de moins qu’en ensemencement normal à 20 à 30% de levain
(2) TH : Taux d’Hydratation
(3) 66%